Pages

dimanche 23 mars 2014

Dire ou ne pas dire

Parfois se le dire avec des mots n'est plus vraiment utile. Quand tes yeux répondent aux miens, quand mon sourire déclenche le tien, quand nos peaux sont parcourues du même frisson, la parole est superflue. Toi, moi, notre amour à la fois comme un pont jeté entre nos deux corps et comme une bulle tout autour.

Parfois se le dire avec des mots n'est plus vraiment suffisant. Quand j'ai besoin de te toucher, quand tu as envie de me sentir, quand nos mains voudraient se trouver mais n'osent pas se chercher, pas encore, pas maintenant, la parole est inefficace. Toi, moi, cette distance qui nous tue quand elle est réelle et qu'on s'impose même quand on a la chance qu'elle se soit pourtant envolée.

Parfois se le dire avec des mots est un défi de tous les instants. C'est à qui fera mieux, à qui dira plus fort, à qui trouvera la punchline qui mettra l'autre KO, à terre, à genoux, suppliant, implorant, demandant l'arrêt immédiat des hostilités parce que c'est fort, parce que c'est grand, parce que c'est trop, parce que c'est impossible à gérer.

Parfois se le dire avec des mots revient à se tester mutuellement. Quelle sera ta réponse ? Vas-tu te dérober ou au contraire aller plus loin ? Remarqueras-tu le fond de vérité caché derrière l'humour ? Arriveras-tu à voir au-delà de mes ironies, de mes tentatives de légèreté ? Es-tu en train de jouer comme tu prétends le faire ou dois-je y déceler des messages cachés ?

Et pourtant continuer à se le dire avec des mots, encore, toujours, tous les jours. Parce que ça nous rassure. Parce que tu aimes ça au moins autant que moi. Parce que j'ai besoin de ça au moins autant que toi. Parce qu'on a une trouille bleue de ce qui se cache derrière tout ce qu'on ne se dit pas. Parce qu'on ne comprend pas bien, que ça nous dépasse un peu, et qu'on ne sait extérioriser qu'avec des expressions choisies, des codes qui n'appartiennent qu'à nous, ces mots créés par nous, pour nous, pour se dire ce qui peut être dit au vu et au su de tous, au vu et au su de nous mêmes.

Un jour, peut-être... 
Un jour, peut-être que je n'aurai plus envie de parler. Plus seulement. Quand l'envie sera plus forte que la peur que ça bouleverse un peu l'équilibre si naturellement installé entre nous. Quand l'envie ira bien au-delà de nos deux voix qui se le disent ou de nos quatre mains qui se l'écrivent.

Tu sais... les lèvres et les mains peuvent servir à tellement plus que ça.

© Isa - mars 2014

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Ça te parle ? Ça te plait ? [Ou pas, d'ailleurs ;-)]
Dis-moi tout !