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samedi 16 novembre 2013

...en pleine rêverie... /fiction/jeu d'écriture/

Cela fait quelques jours que je suis de retour sur ma Terre natale, mon petit caillou caché au coeur de l'Océan Indien, à des milliers de kilomètres de mon quotidien.

J'y ai enfin retrouvé ma famille, le visage de ma mère sur lequel j'aime trouver nos points de ressemblance, les rires de mes petites soeurs qui résonnent entre les murs blancs de leur appartement, nos débats passionnés, nos fous-rires incontrôlés, notre complicité intacte. 

J'y ai retrouvé les couleurs de mon enfance, le bleu du ciel et celui de la mer, le vert tellement plus vert que celui de Paris, le rose des temples tamouls, et le blanc et le noir et le marron et le jaune des visages que je croise dans la rue et qui se mélangent de la façon la plus naturelle et la plus pacifique qui soit. 

J'y ai retrouvé les bruits que mon oreille avait perdu l'habitude d'entendre, l'appel à la prière qui s'élève de la mosquée à la tombée de la nuit, l'accent chantant qui s'échappe de la bouche des Créoles et de la mienne aussi, de nouveau, le grondement des vagues qui s'écrasent contre les rochers.

J'y ai retrouvé les saveurs épicées, les samoussas qu'on trouve à chaque coin de rue, les letchis sucrés qu'on achète une bouchée de pain, les mangues juteuses qu'il suffit de ramasser dans le jardin de ma tante.

Il fait chaud, il fait doux, l'air est pur et chargé de tolérance, l'ambiance est comme toujours à la mixité, à la diversité, au vivre-ensemble. Je suis chez moi.

Je sens pourtant poindre en moi une impatience que je ne maîtrise pas, l'envie d'autre chose, un manque que je n'arrive pas encore à définir. J'enrage de ne pas me sentir comblée par ma présence ici et par tous ces gens et toutes ces choses que je retrouve depuis peu. Que me faut-il de plus, de mieux, de différent ? Je suis tellement frustrée de ne pas atteindre l'état de plénitude que ces vacances me promettaient...

J'en suis là de mes pensées quand quelque chose en interrompt brutalement le cours. Que se passe-t-il donc pour que mon corps se mette à frissonner de façon aussi inattendue ? Les sens en éveil, je m'extirpe du confort moelleux du canapé et pars à la quête de ce qui me met en émoi. 

Et enfin... cette odeur ! L'odeur de la terre qui s'élève dans les airs, l'odeur de la Nature qui s'éveille, l'odeur du ciel qui change en une fraction de seconde.
Puis le bruit. Des petits clapotis d'abord, espacés, difficiles à distinguer, discrets. Et son intensité qui augmente, les clapotis deviennent des coups de semonce que le ciel donne au sol, rapprochés, nombreux, violents. Et son intensité atteint son paroxysme quand on n'entend plus que ça, que la télé semble muette, qu'il faut élever haut la voix pour se comprendre, quand il est continu, assourdissant, enveloppant.

Mon cœur bat à tout rompre au moment où mes yeux embrassent le spectacle que mon île m'offre de l'autre côté de la baie vitrée. Un rideau d'eau tombe lourdement d'en haut pour venir s'écraser dans un vacarme aussi troublant qu'inattendu. La lumière du dehors s'est éteinte, le bleu s'est transformé en gris sombre, les feuilles des arbres se courbent toutes sous le poids du vent qui les met en mouvement.

Tremblante, je sors sur la terrasse pour toucher, sentir avec ma peau, comme pour m'assurer que tout cela n'est pas qu'un rêve. L'eau est chaude, elle sent bon, elle me régénère et je souris.

Enfin, ça y est, je suis comblée, la Nature vient de m'envoyer mon plus beau cadeau de bienvenue. Et il est là, mon moment de plénitude. 

Voilà tout ce qu'il me manquait... une averse de la pluie d'ici.

© Isa - novembre 2013

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Ce texte est ma participation au jeu d'écriture lancé sur la page Facebook de Miss Thé Rieuse. La consigne était d'écrire un texte gai sur la pluie.
Pour voir les participations de Venise, Jay, Miss Thé Rieuse, Emilie, Greg, Blandine et La Fraise, cliquez sur leurs prénoms/pseudos.
 

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